Travail détaché, une tâche pour l’Europe

Thierry Verhoeven
 Cahiers >  Elections 2014 : débats et combats Le 11 mai 2014 | Mise en ligne : Lydia Magnoni

Ils sont 1,5 million en Europe. Ce sont les travailleurs détachés. Leur patron les envoie travailler dans un autre pays pour un certain temps. Une main d'oeuvre bon marché... Des travailleurs exploités... Les syndicats demandent à l’Europe d’imposer des règles aux patrons.


Depuis 1996, une loi européenne autorise le travail détaché. Un patron peut donc envoyer ses travailleurs travailler dans un autre pays pour répondre à une commande. Mais c’est surtout ces dernières années que l’on entend beaucoup parler du travail détaché. Il y a eu l’entrée dans l’Union européenne des pays d’Europe de l’est en 2004 et 2007. Cela a augmenté le nombre de travailleurs détachés. Et surtout, il y a eu la crise financière et économique de 2008. Cela a encore augmenté le nombre de travailleurs détachés. Il y a environ 1,5 million de travailleurs détachés dans l’Union européenne. Pourquoi un tel succès ?

Moins cher

Le travail détaché permet aux entreprises d’offrir des services moins chers tout en faisant des bénéfices. C’est aussi tout bénéfice pour celui qui commande le travail. Comment ça marche ? Vous voulez construire un bâtiment en Belgique ou en France. Vous demandez les prix à plusieurs entreprises. C’est une entreprise polonaise qui est la moins chère. Vous lui commandez le travail. Elle envoie ses travailleurs faire le travail en Belgique ou en France pendant quelques semaines. Si ce n’est pas fini, ils retournent en Pologne, puis ils reviennent terminer le travail. Et ainsi de suite... Ce sont des travailleurs détachés. En principe, le travailleur détaché touche le même salaire et il a les mêmes conditions de travail que les autres travailleurs. Mais les cotisations sociales du travailleur et du patron sont celles du pays d’origine et payées au pays d’origine. C’est ici évidemment que les employeurs des travailleurs détachés se frottent les mains. Car il y a de grandes différences entre certains pays. On estime le taux taux pourcentage, partie d’un ensemble de cotisations patronales à environ 35% en Belgique, 14,8% au Portugal, de 15% en Roumanie, de… 9,7% en Pologne.

Concurrence concurrence compétition entre entreprises pour être le plus rentable et gagner des marchés déloyale

Il ne faut pas être un spécialiste en économie pour voir les conséquences de ce détachement de travailleurs. Les cotisations sociales ne sont pas payées dans le pays où il y a l’activité économique et où se crée la richesse. Les entreprises qui n’utilisent pas le système perdent des commandes à cause d’une concurrence déloyale. Cela crée le chômage économique ou le licenciement sec des travailleurs du pays d’accueil. On estime à environ 1,5 million les travailleurs détachés dans l’Union européenne. En Belgique, il y a eu, en 2009, 217.115 déclarations de travailleurs détachés. En 2011, on était passé à 337.189 ! On sait que c’est dans le bâtiment (25% en moyenne dans l’UE) et dans d’autres travaux temporaires qu’ils sont les plus nombreux. Et, en plus, il y a des fraudes !

Fraudes

Les entreprises étrangères qui envoient leurs travailleurs dans un autre pays doivent les déclarer à la Sécurité sociale du pays en question. C’est pour pouvoir vérifier que l’entreprise est bien en règle dans son pays d’origine. Et ce n’est pas toujours le cas. Rien qu’en Belgique, selon le Ministère du travail, 1.581 dossiers de contrôle d’entreprises étrangères en 2012 ont permis de régulariser les conditions de travail de travailleurs détachés pour près de 7,5 millions d’euros. Même si la Belgique, comme d’autres pays européens, ont créé une inspection spécialisée, on sait que beaucoup d’entreprises échappent au contrôle. Sans parler, des fraudes sociales dans le pays d’origine et du contrôle presque impossible quand il y beaucoup d’entreprises sous-traitantes pour un même travail. Et il y a en plus ce que l’on appelle les entreprises « boîtes aux lettres ».

Entreprise « boîte aux lettres »

Prenons l’exemple d’un travailleur français envoyé par son entreprise en Belgique. Il reste soumis en grande partie au droit social français. La Belgique peut vérifier que l’entreprise française paie au moins le salaire minimum belge à son travailleur et qu’il est assuré socialement en France. Mais certaines entreprises ouvrent une simple entreprise « boîte aux lettres » dans un Etat où la protection sociale est moins chère, où les salaires sont moins élevés. Cette entreprise peut donc envoyer en France ou en Belgique des travailleurs payés aux conditions roumaines ou polonaises. Et certaines transforment même leurs travailleurs français ou belges en travailleurs soumis à la législation roumaine ou polonaise ! Depuis 1996, la loi sur le travail détaché casse les droits sociaux et les emplois nationaux. En son principe et en son application : on l’a vu les fraudes sont nombreuses. D’ailleurs les ministres des Etats de l’UE ont, plusieurs fois, annoncé un renforcement des contrôles. Mais cela n’est pas suffisant. Les syndicats proposent, par exemple, de créer une véritable police sociale européenne pour vérifier si les entreprises respectent bien les règles.


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