En Wallonie, le ministre Pierre-Yves Jeholet et le gouvernement veulent changer le système des aides au secteur non-marchand. Pour les patrons et travailleurs du secteur, ces réformes menacent des milliers d’emplois et des services à la population. Le non-marchand, ce sont les crèches et garderies, maisons de repos, écoles, clubs sportifs, hôpitaux, bibliothèques, communes, CPASCentre public d'action sociale et provinces, centres de formation, associations culturelles, etc. Le non-marchand rend de nombreux services à la population. Cela se fait grâce aux services publics (communes, provinces, par exemple) et grâce aux services « privés » mais ceux qui ne font pas de bénéfices (ASBLAssociation sans but lucratif, qui ne fait pas de bénéfices, par exemple). Ces services à la population sont gratuits ou presque. Pour qu’ils existent, il faut donc des subsides et des aides publiques. Il ne faut pas laisser le non-marchand au marché.
Des services à la population
Le système des aides publiques qui soutiennent l’emploi dans le secteur non-marchand concernent 60 000 travailleurs en Wallonie. Elles servent à payer la moitié de leur salaire. On appelle cela les aides à la promotion de l’emploi, APE en abrégé. Ces aides sont donc très importantes pour les travailleurs, mais aussi pour leurs employeurs, leurs patrons. Car les employeurs du secteur non-marchand gèrent des services publics et des services privés qui ne font pas de bénéfices. Ils rendent avant tout service à la population. Ils ont donc besoin de subsides de l’Etat, ici de la Région wallonne.
Financement insuffisant
On comprend donc que les syndicats et les associations des patrons du non-marchand soient très attentifs à tout changement dans ces aides. Et pour les syndicats et les employeurs du non-marchand, la réforme prévue par le gouvernement va diminuer les subsides. Cela veut dire des pertes d’emplois, moins de services à la population et des services plus chers. Le ministre, lui, dit qu’il veut simplifier le système et le rendre plus clair. Pour les syndicats et les patrons, le ministre et le gouvernement veulent dépenser moins pour le non-marchand.
Système compliqué
Le ministre a raison : le système des aides APE est compliqué. Mais pourquoi ? Parce que depuis des années, les pouvoirs publicsL'Etat, le gouvernement, les administrations ne financent plus assez les services du secteur non-marchand. Comme on ne peut pas complètement supprimer ces services très utiles à la population, les pouvoirs publics bricolent souvent des systèmes d’aide financière compliqués et insuffisants. Les associations du non-marchand ne peuvent donc pas maintenir à 100 % les services à leur public, encore moins les développer.
Le non-marchand pour les moins riches
Depuis des années en effet, c’est une logique marchande qui s’impose à tous les niveaux de la société. Qu’est-ce qu’une logique marchande ? C’est une logique économique de concurrencecompétition entre entreprises pour être le plus rentable et gagner des marchés qui répond aux besoins de la population à condition que cela rapporte des bénéfices. Le secteur non-marchand répond aux besoins de la population sans faire de bénéfices. Et ce secteur ne date pas d’hier. Dans l’histoire, les mouvements ouvriers ont développé leurs propres structures d’aide et de service à celles et ceux qui n’étaient pas les riches, les privilégiés de la société.
Des aides publiques pour le public
Au fil du temps, les structures non marchandes se sont professionnalisées. Et au fil du temps, les pouvoirs publics ont aidé financièrement ces structures. Car les structures non marchandes permettent à la société et au système économique de fonctionner. Par exemple, les centres de formation rendent plus compétents des demandeurs d’emploi peu qualifiés et leur permettent de mieux affronter le marché du travail ou de trouver un job. Autre exemple, les crèches et garderies permettent aux parents occupés par le travail ou la formation de faire garder leurs enfants à peu de frais. Les associations du secteur non marchand aident, informent, forment, responsabilisent les personnes qui sont dans la précaritéle fait d'être dans une situation fragile, incertaine. Et elles le font d’une certaine façon.
Compétents et citoyens
Quand les associations du secteur non marchand aident les personnes précariséesfragilisées, qui vivent dans des conditions difficiles, peu qualifiées, c’est avec respect, avec dignitéRespect pour l'être humain, avec un sentiment d’égalité, et pas pour faire de la charité. Quand elles responsabilisent les personnes en difficulté, c’est pour les aider à mieux s’insérer dans la vie sociale et professionnelle, mais sans les rendre coupables de leur situation. Quand elles informent les personnes précarisées ou dites peu qualifiées, c’est pour leur dire leurs devoirs, mais aussi leurs droits. Quand elles forment des demandeurs d’emploi peu qualifiés, c’est pour augmenter leurs compétences professionnelles tout en leur permettant d’être plus et mieux un citoyen, de participer plus et mieux à la vie démocratique.
Pas de prix
Les associations du non-marchand travaillent pour que les personnes « laissées pour compte » un peu ou beaucoup, vivent mieux, pour que notre société fonctionne mieux, pour que notre économie fonctionne mieux. Ces associations le font en donnant aux personnes en difficulté les moyens d’être vraiment des citoyens soucieux et contents d’apprendre, de comprendre, de participer à ce que notre société soit plus juste, plus solidaire, plus égalitaire. Et ça, ça n’a pas de prix dans une démocratie.