Pendant 30 ans, Marina a piloté la formation et le passage du chef-d’œuvre pour adultes dans un centre de formation de Charleroi. Ce n’est pas 100 fois, mais plusieurs centaines de fois qu’elle a accompagné des stagiaires dans leur démarche. Du chef-d’œuvre, elle nous explique ce qu’il est , comment il s’organise et ce qu’il apporte aux stagiaires.
Depuis 1994, la FunocFormation pour l'université ouverte de Charleroi, centre d’insertion socio-professionnelle de Charleroi, organise une formation afin de préparer des stagiaires à l’obtention du Certificat d’Etudes de Base (CEB). Cela se fait en collaboration avec la Fédération Wallonie-BruxellesInstitution compétente pour les francophones de Wallonie et de Bruxelles. Comme toutes les formations de la Funoc, cette formation facilite l’accès à des formations qualifiantes ou à certains emplois. Mais en plus, la formation au CEB débouche sur un diplôme officiel.
Une épreuve appelée « chef-d’oeuvre»
L’épreuve que passent les stagiaires à la Funoc n’a rien à voir avec le CEB des élèves du primaire. En effet, pour avoir leur CEB, les stagiaires réalisent un « chef-d’oeuvre». Qu’est- ce que ce chef-d’oeuvre? Le chef-d’œuvre est un travail de recherche sur un sujet choisi par le stagiaire. Le résultat de cette recherche est présenté dans une production écrite structurée, comme un mémoire de fin d’études, un TFE. Il est accompagné d’un portfoliodossier où le stagiaire explique son parcours d'apprentissage qui témoigne du travail effectué. Les résultats de la recherche sont ensuite présentés oralement devant un jury composé d’inspectrices et d’inspecteurs de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Venu d’un autre âge
Pourquoi appeler cette épreuve un « chef-d’oeuvre» ? Le mot vient du Moyen Agepériode de l'histoire européenne qui va du 5e siècle au 15e siècle. L’apprenti, pour devenir « compagnon » dans sa corporation, devait réaliser un ouvrage, appelé « chef-d’oeuvre», qui prouvait sa maîtrise du métier et sa rigueur. De la même manière, le stagiaire, pour réaliser son chef d’œuvre, met en application, avec rigueur et un certain courage, ses compétences acquises, entre autres, pendant la formation. Il prouve ainsi qu’il les maitrise.
Français, Maths, Informatique et… le Monde !
Il y a évidemment des cours sur la réalisation du chef d’œuvre. Chaque stagiaire travaille sur son sujet. Pour l’aider dans son travail, il a un cours de méthodologie. Ce cours lui donne de bonnes méthodes pour s’organiser et avancer dans sa recherche. Il apprend aussi à évaluer la fiabilité d’une source d’information. A l’ère des fake news, cette nouvelle compétence est particulièrement importante.
Pendant la formation, il y a aussi des cours de remédiation en français, en maths, et des cours pour mieux comprendre les réalités du monde pour avoir plus d’esprit critique et de capacité d’agir.
Un cours lui apprend aussi à utiliser l’outil informatique (traitement de texte, diaporama) et à rechercher une information fiable sur internet. On parle aujourd’hui de fracture numériqueInégalités sociales quant à l'utilisation d' internet. On peut dire que le stagiaire qui a réalisé un chef-d’œuvre maitrise de nombreuses compétences numériques
Points forts de cette méthode
Cette dynamique autour de la réalisation de ce travail a beaucoup de points positifs :
- Le stagiaire adulte se trouve dans une situation où il est acteur de sa formation.
- Il se fixe un objectif à partir d’une question personnelle qu’il se pose.
- Il est tour à tour chercheur, lecteur, rédacteur, metteur en page, orateur.
- A chaque étape, il renforce ses compétences mais aussi ses capacités à l’autonomie.
- Il développe son pouvoir, et, parce que son sujet s’inscrit dans la réalité sociale, il développe aussi son esprit critique, sa « citoyenneté ».
Un défi qui rend fier
Le chef-d’œuvre représente un réel défi pour les stagiaires qui, souvent, manquent de confiance en eux. Ils ont réalisé ce long travail et ils ont un diplôme au bout du chemin. C’est une reconnaissance officielle de leur valeur et une source de fierté.
Enfin… le citoyen!
Il y a aussi un aspect citoyen. Le stagiaire choisit un sujet sur une réalité sociale. Il doit essayer de la comprendre. C’est ainsi qu’ il en découvre la complexité. Car le monde et ses réalités sociales ne sont pas si simples qu’on peut le penser au départ. C’est comme le chef d’œuvre.