vendredi 29 mars 2024

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« La familia grande », une grande famille ?

« La familia grande » est un livre qui nous raconte l’histoire d’une grande famille. L’histoire d’une famille aisée dont les membres sont beaux, intellectuels. Une famille de personnes connues du monde universitaire. Une histoire heureuse, alors? Non, l’histoire de cette famille est tragique.

Le tragique

D’abord, il y a Georges le grand-père. Ce haut fonctionnaire a collaboré avec les Allemands pendant la guerre. Il se suicide. Puis, il y a sa femme Paula, la grand-mère. C’est une femme très belle qui ressemble à Marylin Monroe. Elle milite pour les droits des femmes dans les années 50. Elle se suicide 2 ans après son mari. Ensuite, il y a leurs 2 filles : Marie-France et Evelyne. Marie-France Pisier devient une célèbre actrice française dans les années 70 et 80. On la retrouve morte au fond de sa piscine, à l’âge de 67 ans. Suicide, accident ou meurtre, on ne sait pas…

Le père absent

Et puis dans le livre, il y a surtout Evelyne Pisier, la deuxième fille de Paula. Evelyne est un des personnages principaux du livre. Evelyne est une brillante professeure de droit et de sciences politiques. Elle se marie d’abord avec Bernard Kouchner. Kouchner a fondé Médecins sans frontières et est devenu un médecin célèbre. Ils ont ensemble 3 enfants dont des jumeaux : une fille Camille et un garçon Victor. Bernard Kouchner est souvent absent. Bernard et Evelyne finissent par divorcer. Evelyne se remarie avec Olivier Duhamel, grand professeur d’université lui aussi.

Le bonheur

En plus des 3 enfants d’Evelyne, le couple adopte 2 enfants. Les 5 enfants et Evelyne adorent Olivier. Olivier passe beaucoup de temps avec eux, avec sa famille, une grande famille, donc. Oui, mais la « familia grande », qui est le titre du livre, c’est plus de gens encore. Ce sont d’autres membres de la famille, des amis, des collègues. Cette « familia grande » passe beaucoup de temps ensemble et surtout pendant les vacances d’été dans 2 grandes villas à Sanary, dans le sud de la France. Plus d’une cinquantaine de personnes s’y croisent pendant les 2 mois de vacances.
On discute politique, mais surtout on joue, on nage, on danse. La liberté est la règle pour les parents et pour les enfants. Après les 2 suicides des grands-parents et la mort de Marie-France, l’histoire de la famille Duhamel-Pisier est-elle enfin heureuse ?

Le malaise

Cette histoire est heureuse en apparence seulement, car il y a un malaise. Dans la villa de Sanary, les adultes ne se gênent pas devant les enfants: ils ont des paroles et des gestes sexuellement explicites. Par exemple, Olivier aime faire des photos en gros plan de ses enfants nus. Il les affiche sur les murs de la villa et tous les invités peuvent les voir. Et on apprend dans le livre qu’Olivier ne s’arrête pas aux photos.

L’enfant violé

Le soir, il se glisse dans la chambre de son beau-fils Victor qui a 13 ans et le caresse. Olivier lui dit que c’est normal, que tout le monde fait ça. Que c’est pour lui apprendre la sexualité. Le livre ne dit pas et on ne sait pas s’il y a eu pénétration et donc viol, comme la loi le définit. Mais ces violences, ces abus sexuels d’Olivier ont profondément marqué Victor. Il se confie à sa jumelle Camille, mais il lui demande de garder le secret. Les enfants sont perturbés, mais ils se demandent : est-ce bien ou mal ? Ils sont trop jeunes pour savoir. Ils aiment Olivier comme un père. Ils l’admirent et ils pensent qu’il ne peut pas leur faire du mal.

Les enfants se taisent

Les années passent et les abus sexuels continuent. A 17 ans, Victor quitte la maison familiale pour échapper à son beau-père. Camille se sent coupable de ne rien dire à sa mère mais elle a peur. Peur que sa mère ne la croie pas. Peur que sa mère se suicide elle aussi comme les grands-parents Paula et Georges. Peur de faire de la peine à Olivier. Elle ne dit rien, mais elle vit très mal avec ce secret. Victor et Camille vont très mal. Camille tombe gravement malade à plusieurs reprises et devient anorexique. Mais pour leur mère, les enfants continuent à faire « semblant de rien ».

La mère se tait

En 2008, à 33 ans, Victor se décide enfin à parler. Il raconte à sa mère tout ce qu’Olivier lui a fait subir. La mère réagit mal. Elle dit que ce n’est pas si grave. Elle reproche à ses 2 enfants de lui avoir menti en se taisant pendant toutes ces années. Elle leur reproche aussi de vouloir lui voler Olivier, de vouloir les séparer. La mère dit : «C’est moi la victime.» Evelyne choisit son mari plutôt que ses enfants. Evelyne influence ses enfants pour qu’ils n’en parlent pas autour d’eux. Elle refuse de quitter Olivier et ne voudra plus voir ses enfants Camille et Victor.

Olivier, l’homme important

Evelyne choisit donc de se taire, malgré tout. Se taire, comme beaucoup de gens semble-t-il. Des gens de la « familia grande » qui venaient à Sanary et qui se doutaient ou même savaient. Eux aussi, ils se sont tus et se taisent encore. Parce qu’Olivier est un homme important, aimé, admiré.

La délivrance

En 2017, presque 10 ans après les aveux de ses enfants, Evelyne, la mère, meurt subitement d’un cancer. Et Camille décide alors de raconter l’histoire de leur famille dans ce livre. Pour se libérer. Pour aller mieux. Pour se sauver. Pour ses enfants à elle. Pour les enfants de Victor. Pour Victor aussi, même si lui préfère le silence. Victor ne veut pas s’exprimer publiquement sur ce qu’il a vécu mais il autorise sa jumelle à écrire le livre. Cela donne un livre, beau et émouvant, « La familia grande » de Camille Kouchner.

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