Ce qu’en dit Marina Meggetto
J’étais là à la naissance du bébé en 1990. Pour une première approche, Lydia avait choisi de nous réunir au café l’Impasse Temps. Installés dans les fauteuils du premier étage, nous étions une dizaine de formateurs et formatrices de la FUNOCFormation pour l'université ouverte de Charleroi mis au parfum.
Lydia nous expose le projet : un journal dont le nom n’était pas encore arrêté, mais il était déjà question de L’Essentiel et d’un sloganphrase courte et frappante pour défendre une idée, une opinion., l’information ou l’actualité simple comme bonjour.
Son objectif : rendre l’actualité accessible à tous grâce à des articles rédigés dans
un français facile, où les évènements sont contextualisés, où les mots compliqués sont définis dans un glossaire. Cerise sur le gâteau, le journal serait illustré par un dessinateur bourré de talent, l’intimidant Serge Delescaille, le mari de Lydia à l’époque. Je crois que toutes les personnes présentes ce jour-là ont suivi.
Je me suis impliquée dans ce projet avec le désir constant de comprendre avant de faire comprendre.
J’ai mieux pris conscience des pièges auxquels sont confrontés nos stagiaires, lecteurs non confirmés, comme les doubles négations, la voix passive, les longues phrases, les subordonnées, etc.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, devoir se pencher sur ces questions complexes pour les rendre compréhensibles à des lecteurs non initiés n’est pas chose facile. Il ne s’agit
pas de simplifier la réalité, mais d’en faire comprendre toute la complexité, de montrer toutes les facettes qui la composent, le faisceau des causes et des origines qui sous-tendent les réalités.
Lydia nous fournissait des coupures de presse provenant de journaux belges ou français réunies dans une grande enveloppe brune. Nous en faisions la synthèse non sans nous être documentés par ailleurs. Ça me prenait des plombes ! J’avais toujours cette crainte : allais-je y arriver ? Mais j’aimais ce moment où j’avais terminé : ça valait ce que ça valait, mais après tant de remaniements, j’y étais parvenue.
L’article était ensuite relu par Lydia qui en vérifiait la lisibilité et le modifiait si elle le jugeait nécessaire… une étape parfois douloureuse ! (je rigole)
Pour un article sur le conflit israélo-palestinien, il a fallu bien sûr remonter le cours de l’histoire. Ma formation d’historienne m’y portait de toute façon. J’ai consulté mon Encyclopédie Universalis (pas d’internet à l’époque) et je me suis plongée dans l’histoire fascinante du peuple juif. J’ai lu tous les corrélats : pogroms en Russie, diaspora, Herzl, la Déclaration Balfour, le partage des terres en 45, les guerres, les territoires occupés et le terrorisme… J’étais devenue incollable sur la question !
Comme il s’agissait d’un article de 2 pages, je collaborais avec un collègue qui était aussi un ami, Jean-Luc Vansina. Je ne sais plus comment nous nous sommes partagé les tâches, mais ce fut cocasse. Au fur et à mesure que je me documentais et sans nier le point de vue d’Israël, j’étais plutôt pour les Palestiniens. Jean- Luc c’était plutôt l’inverse. Ce ne fut pas simple de rédiger cet article, mais riche par les vives discussions qu’il provoquait. Tous les articles étaient l’occasion de réflexions. Ainsi, une fois par mois, à côté de mon travail de formatrice à la FUNOC, je voyageais à travers l’actualité et j’approfondissais une question…
Dans L’Essentiel, il y a deux photos que j’aime particulièrement. Dans un dossier sur l’immigration, il y a une photo de mon père, prise dans les années 50. Il pose, avec d’autres mineurs, devant les châssis à molettes du puits 24, rue du Charbonnage à Couillet… L’autre photo montre un Vopo devant la porte de Brandebourg à Berlin. C’est le père de mon fils qui l’avait prise lors d’un voyage que nous avions fait en novembre 1989 pour vivre ce moment historique.
Merci Lydia de m’avoir embarquée dans cette aventure ! Je n’en garde que de bons souvenirs…