vendredi 3 mai 2024

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Le Triangle? Que des bons côtés

A Charleroi, Le Triangle est la seule structure qui accueille les familles à la rue. Le Triangle, c’est un abri de nuit, c’est un accueil de jour et c’est une maison d’accueil. Les 3 services se complètent. L’abri de nuit assure un accueil d’urgence, la nuit forcément.  L’accueil de jour assure un accueil, de jour forcément, on l’appelle Transi Toi . Enfin, la maison d’accueil héberge les familles pendant parfois un an, on l’appelle La Résidence sociale. Elle donne aux familles le temps de trouver un logement, mais aussi d’apprendre ou de réapprendre à s’occuper de soi, de sa famille, de ses enfants, d’une maison, d’un budget, à être plus autonome. Gens à la rue, accueil d’urgence, etc. Certains diraient : « On voit bien ce que c’est. » Pourtant, on a voulu rencontrer le directeur pédagogique du Triangle pour sortir des images toutes faites.

Enfants de bateliers

On passe les grilles de l’entrée, au bout une grande maison un peu vieillotte, elle a beaucoup  vécu, elle a un besoin d’être rénovée. Devant le bâtiment, une sculpture : un gouvernail et une ancre, des dessins de jeu de marelle au sol… Car avant,  c’était une école et un internat pour les enfants de bateliers. Pendant que les parents étaient sur leur péniche occupés à travailler, les enfants étaient confiés à l’internat. L’endroit était déjà un lieu d’accueil, il continue de l’être, mais c’est pour un tout autre public.

Des femmes à la rue

Depuis une vingtaine d’années, Le Triangle accueille des familles avec enfants qui se retrouvent du jour au lendemain à la rue. Parce que tous les jours il y a des expulsions. Elles touchent des familles, des femmes et des hommes seuls avec leurs enfants. Emmanuel Mathieu, le directeur pédagogique du Triangle que nous avons rencontré nous explique: « Prenez, par exemple, une maman seule. Elle se présente. Son mari l’a quittée et elle est désœuvrée, elle est victime d’une expulsion parce qu’elle n’a pas pu payer le loyer. On en parle peu, mais il y a des expulsions tous les jours. Le matin, elle dépose ses enfants à l’école. Et puis dans la journée, elle se retrouve sans logement. Alors, elle vient chez nous. Après l’école, les enfants viennent ici. Pour les enfants et la maman, c’est un double traumatisme. Elle perd son mari, son logement. Les enfants perdent leur logement, ils dorment dans un abri de nuit. C’est difficile à encaisser. »

Sans le PCS, pas d’abri

Au début, il y a plus de 20 ans, il n’y avait qu’un abri de nuit au Triangle. L’abri de nuit est toujours là. C’est un accueil d’urgence, un dépannage et un lieu d’écoute. Depuis 2017, l’association a créé en plus un accueil de jour, c’est « Transi Toi ». Il est ouvert 7 jours sur 7 jours de 8h30 à 20h30,  4 éducateurs y travaillent. « Transi Toi » accueille les parents et les enfants. Le projet Transi Toi est possible grâce surtout au Plan de Cohésion Sociale de la Région wallonne. Emmanuel Mathieu insiste : «  Pour La Résidence sociale, notre maison d’accueil, les subsides de la Région wallonne peuvent suffire. Mais pas pour les 2 autres services !  S’il n’y avait pas le PCS, je ne sais pas comment on ferait… vraiment. L’abri de nuit et l’accueil de jour devraient sans doute fermer. Et pourtant, il y a de plus en plus de demandes.»

Résidence sociale 

La Résidence sociale est une maison d’accueil. Elle héberge les familles pendant 6 mois voire un an. La Résidence sociale, c’est plus qu’un hébergement. Le directeur nous le dit :  « Souvent chez ce public désœuvré, il y a une reproduction : on a les enfants de la génération d’avant qui étaient venus ici ! On a envie de casser ça. Comment ? Un bon logement ne suffit pas. Ben alors, il y a l’école, l’encadrement, un bon accompagnement. L’éducation est nécessaire. » Emmanuel Mathieu ajoute : « Le travail ne se limite pas à mettre un toit sur la tête des gens, il y a aussi tout un travail pédagogique.  Ici, on (ré)apprend à se coucher tôt, à se laver, à se brosser les dents, à préparer le cartable, se mettre en route pour l’école tous les jours, peu importe le temps, gel, pluie, même s’il y a grève des bus, on cherche des solutions.» La sortie de la Résidence sociale se prépare avec les personnes et se poursuit après l’installation dans un logement individuel.

Un parcours royal !

Quel serait l’exemple de la réussite de l’action d’accueil du Triangle ? Pour Emmanuel Mathieu, il y a une voie royale : « Toutes les familles arrivent en accueil de nuit (ou de jour). Ensuite, elles ont une place à la maison d’accueil, Elles y restent, disons 6 mois. Elles se sont posées, reposées, elles redeviennent autonomes. Et après, les familles ont un logement social.  C’est évidemment un parcours idéal. » Ca arrive évidemment, mais pas aussi souvent qu’on le voudrait. Pas facile de trouver un logement privé et la liste d’attente est longue pour avoir un logement social.

Des projets

Emmanuel Mathieu nous parle encore d’un chenil récemment ouvert au Triangle pour accueillir les personnes et leur animal de compagnie préféré. « Souvent, c’est leur dernier lien .» nous dit Emmanuel Mathieu. Et il y a encore un autre projet : accueillir des femmes victimes de violences conjugales. Car comme nous le dit Emmanuel Mathieu : « Pour elles, c’est la double peine. Non seulement ces femmes sont des victimes,  mais ce sont elles qui doivent partir,  trouver un logement. »

De la pédagogie

Et puis, avant de partir, on demande une explication à Emmanuel Mathieu sur son titre : directeur pédagogique. Emmanuel Mathieu répond: « La pédagogie, c’est l’âme du travail : prendre le temps d’écouter, d’accompagner, de mettre en place de nouveaux projets. »  Il nous donne sa vision du boulot:  « C’est que  la société, c’est comme un train en marche et tout le monde doit y monter, et de temps en temps, il y a des gens qu’il faut aider à monter. Et parfois, les gens refusent cette aide. On peut trouver cela bizarre,  les personnes refusent l’aide proposée, mais il y a plusieurs explications à cela. Certaines personnes se sentent trahies par le système. D’autres sont tout simplement épuisées, elles n’arrivent plus à voir de perspective, c’est difficile d’avoir des projets. Elles ont une vision à court terme : « Mes clopes, ma bouffe ».  On ne parle plus le même langage.»

Rouvrir l’horizon

Emmanuel Mathieu poursuit : « Enfin, il y a aussi la question de la place dans la société comme « Je n’ai pas ma place à l’école » : « Parfois les enfants sont victimes de rejet, de moqueries de la part des autres enfants et parfois, indirectement des enseignants. Ils ne veulent plus y aller, on tourne alors le dos à un horizon très large et on restreint les choses, les enfants sont dans une voie de garage. » On quitte Emmanuel Mathieu et on se dit alors : « Au-delà de l’accueil, de l’hébergement, c’est pour  rouvrir l’horizon à ces personnes et leur tracer un chemin qu’il y a Le Triangle.»

La page Facebook du Triangle

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