Le 25 août 1830, le théâtre de la Monnaie, à Bruxelles,
donne une représentation de l’opéra La Muette de Portici,
du musicien Auber. La future Belgique n’est encore qu’une province
des Pays-Bas. La révolte y gronde depuis plusieurs mois. Les Belges
ne s’entendent pas beaucoup avec leurs voisins hollandais. Les Belges
d’alors sont catholiques et plutôt bons vivants. Les Hollandais
sont de religion calviniste et donc pas très portés sur les plaisirs
de la vie. En plus, les (futurs) Belges sont 3,5 millions contre 3 millions
de Hollandais.
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Le cri de la Muette
Les responsables du théâtre de la Monnaie savent-ils ce qu’ils
font en programmant La Muette de Portici ? Personne ne le sait. Mais cet opéra
raconte la révolte des habitants de Naples, en Italie, contre leurs
occupants. Et le refrain n’est autre que : «Amour sacré de
la patrie, rends-nous l’audace et la fierté». Dans une province
en révolte contre le pouvoir hollandais, le sujet et le refrain de ce
chant pouvaient créer le désordre. Reste que ce ne sont évidemment
pas les milieux populaires qui, alors, étaient à l’opéra.
Ce sont les bourgeois. Ils reprennent en chœur le refrain et chantent
leur patriotisme belge. Des émeutes éclatent à la sortie.
Les bourgeois, très vite rejoints par d’autres, montent à l’hôtel
de ville de Bruxelles, tout proche. Là, ils prennent les couleurs de
la province du Brabant pour en faire le drapeau belge : noir, jaune, rouge.
Une révolte qui gagne
Les révoltés proposent aux Hollandais une sorte de fédéralisme.
Mais le roi Guillaume 1er des Pays-Bas ne veut rien savoir. Du coup, la révolte
gagne d’autres villes belges wallonnes, dont Liège et Namur. Les
cités ouvrières, elles, pour une fois, rejoignent la bourgeoisie.
La révolte se généralise d’abord aux sons de La
Marseillaise puis de la Brabançonne, écrite pour l’occasion.
En réalité, les bourgeois, qui parlent français, voudraient
surtout voir la Belgique rattachée à la France. Mais les autres
pays ne veulent pas de cette solution. Par contre, ils voient d’un bon œil
une Belgique indépendante. En fait, la bourgeoisie est dépassée
par un noyau révolutionnaire qui crée un gouvernement provisoire.
Le 23 septembre, les insurgés montent des barricades dans le parc de
Bruxelles et affrontent l’armée hollandaise qui se retire assez
vite, le 26 septembre. Il y a eu des morts mais pas de vrai bain de sang. Le
27 septembre, le gouvernement provisoire proclame l’indépendance.
La Belgique est née. Un congrès nationalPremier parlement de la Belgique indépendante est convoqué pour
donner une constitution à ce nouvel Etat.
A la recherche d’un roi
Mais ce nouvel Etat sera-t-il une républiquerégime politique dans lequel le chef d'Etat est un Président ou un royaume? Le roi de
Hollande convoque, le 4 novembre 1830, une réunion des cinq grandes
puissances de l’époque, la Grande-Bretagne, la France, la Russie,
la Prusse et l’Autriche. Ces cinq pays reconnaissent la séparation
avec les Pays-Bas. Puis, le 20 janvier 1831, ils proclament l’indépendance
de la Belgique. Mais ils l’obligent à être neutre.
L’heure est alors, partout, à la royauté. C’est donc
tout naturellement que le gouvernement belge se cherche un roi qui serait approuvé par
les cinq grandes puissances. Ce sera finalement le prince Léopold de
Saxe-Cobourg-Gotha. Léopold est poussé par les Anglais et il
va épouser une princesse française, Louise d’Orléans.
Politiquement, Léopold arrange donc tout le monde. Le 21 juillet 1831,
Léopold 1er prête serment sur la Constitution belge et devient
notre premier roi. Le 21 juillet est devenu notre fête de l’indépendance
fête nationale).
Une réponse
Nous reproduisons ici un commentaire d’un lecteur attentif qui nous fait part de ses remarques et précisions. Nous rappelons aussi que nos articles simplifient les sujets et que parfois, c’est vrai, il peut y avoir des simplifications un peu abusives. Nous rappelons aussi que nos articles sont une première approche et accroche pour les lecteurs/trices.
Dominique Meeùs:
Est-ce que l’usage (comme substantif ou comme adjectif) de la partie (une province, la Hollande) pour le tout (les Pays-Bas) n’est pas aujourd’hui en net recul, archaïque ? Peu éducatif aussi ?
Est ce que « les cités ouvrières […] rejoignent la bourgeoisie », ou bien la bourgeoisie profite d’un soulèvement populaire ? Il me semble que des historiens plus modernes mettent en avant le soulèvement populaire.
« Les Hollandais sont de religion calviniste et donc pas très portés sur les plaisirs de la vie. » C’est vrai de la partie. Mais comme on vise évidemment le tout, c’est faux. Les Néerlandais du sud (comme l’éthologue Frans de Waal), plus souvent catholiques et bons vivants, se moquent des Hollandais (au sens propre) sur ce point.