Après les élections, l’Allemagne sera dirigée par
une alliance entre la gauche et la droite, entre la social-démocratie
et la droite chrétienne. Dans le même temps, l’économie
allemande va mal. On supprime des emplois et la protection sociale diminue. Chacun
essaie de jouer à qui perd gagne.
 Photo: Belga |
Dans les années 1970 et 1980, l’Allemagne était souvent
donnée comme modèle économique et social de l’Union
européenne. Ce pays avait une bonne croissance économique, peu
de chômeurs, de bons accords entre patrons et syndicats. Depuis quelques
années, le modèle va mal. Il y a eu bien sûr la réunification
avec l’Allemagne de l’Est qui a coûté cher à la
population et à l’Etat. Mais cela n’explique pas tout. La
réunification, c’était il y a 15 ans! Pour sortir de la
crise, le gouvernement socialiste de Gerard Schröder a lancé de
grandes réformes. Il voulait rendre le marché du travail plus
souple, diminuer les droits sociaux et faire des économies pour l’Etat.
L’indemnité de chômage est limitée à un an.
Les soins de santé coûtent plus cher. Le résultat n’est
pas vraiment au rendez-vous. Ce n’est pas vraiment le chômage qui
baisse, ce sont les salaires.
Perdants
Beaucoup d’Allemands sont déçus. Les travailleurs, les
syndicats, les mouvements de gauche protestent contre les réformes du
gouvernement pourtant socialiste. Des socialistes mécontents de la politique
de leur parti, les ex-communistes d’Allemagne de l’Est, des syndicalistes
créent un nouveau parti : le Parti de la Gauche. En face, la CDU/CSU,
la droite chrétienne démocrate, en profite. Elle veut aller plus
loin dans les réformes. La droite propose d’augmenter la TVA.
C’est plus injuste encore que l’impôt direct. Cela avantage
les plus riches. Elle propose aussi des sanctions plus fortes pour les allocataires
sociaux.
Le dirigeant Schröder décide alors de provoquer des élections
pour tenter de sauver son parti. Schröder a joué à qui perd
gagne. Et c’est presque une victoire complète. Aux élections
de septembre, son parti a perdu beaucoup moins que prévu. Face au programme
de la droite, les électeurs se sont mobilisés pour le parti socialiste.
Face à la droite, Schröder a aussi tenu un discours plus à gauche,
plus social. La droite n’a pas eu la victoire qu’elle espérait.
On va donc vers une alliance entre les deux grands partis Allemands. Mais la
vraie surprise est le score réalisé par le Parti de la Gauche.
Elle passe de 2 à 54 élus ! Avec un programme de justice sociale,
de salaire minimum et d’interventions de l’Etat dans l’économie.
Gagnants
L’Allemagne n’est peut-être plus le modèle économique
et social de l’Union européenne. Mais ce qui se passe politiquement
dans ce pays intéresse encore toute l’Union européenne
et tous les Européens. Dans les autres pays de l’Union européenne,
les partis au pouvoir, même socialistes, ont tendance à diminuer
la protection sociale. Dans les autres pays de l’Union européenne,
les partis de droite veulent encore aller plus loin dans les avantages accordés
aux employeurs. Mais dans d’autres pays de l’Union européenne,
comme en France, une partie de la gauche veut revenir à plus de justice
sociale.
Pendant ce temps-là en Allemagne, malgré les avantages donnés
aux employeurs, on continue à supprimer des emplois. Pour les prochaines
années, Volkswagen annonce 10 000 pertes d’emploi; Mercedes, 9
000; Siemens, 2 500; les magasins Spar 900 licenciements secs. Il y a en Allemagne
comme dans d’autres pays de l’Union européenne, des employeurs
qui n’ont pas besoin de jouer à qui perd gagne. Ils partent d’avance
gagnants.
Thierry Verhoeven
