samedi 18 mai 2024

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Les ministres, les marchandages et le grand marché




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Didier Reynders, Louis Michel et Guy Verhoofstadt présentent la "Constitution
pour l’Europe" (Photo: Belga)

2004 est une grande année pour l’Union européenne. Le 1er
mai, elle va s’élargir de 15 à 25 pays. En juin, il y aura
les élections des députés européens. Aux côtés
des élus français, belges et allemands, il y aura donc des Estoniens,
des Polonais, des Tchèques, des Maltais… Après l’arrivée
de l’euro, l’Union européenne frappe donc un grand coup avec
l’élargissement. Seul petit problème: comment va-t-elle
fonctionner politiquement?

Née dans les années 1950 avec 6 pays, l’Europe commune va
bientôt rassembler 25 membres. Ces grands et petits Etats ont leurs traditions,
leurs histoires, leurs visions politiques, leurs particularités économiques
et sociales… Même les plus naïfs savent que le fait que les personnes
et les marchandises peuvent désormais circuler librement sur le territoire
des pays membres ne suffit pas à créer une Union politique. Depuis
plusieurs années, les dirigeants des Etats membres cherchent donc une
solution. Et ils ne la trouvent pas… Quand ils discutent, ils arrivent
au mieux à un accord, mais après de longs marchandages. Ca ne fait
pas sérieux.

Les coupables

C’est pour cela qu’il y a eu la grande idée: une constitution
européenne. Ce texte de base doit fixer les objectifs de l’Union, énoncer
les droits et devoirs des citoyens et régler les prises de décision
de ce “grand machin” de 25 pays. Cette constitution a été préparée
par 105 personnes: des représentants des 25 gouvernements et de la Commission,
mais aussi des députés nationaux et européens. En décembre
dernier, les chefs d’Etat et de gouvernement ont discuté de cette
constitution à Bruxelles. Après 50 ans, il était temps.
Résultat? Une solution a été trouvée? Non, le sommet
de Bruxelles s’est terminé sur un échec. A qui la faute?

On accuse l’Espagne et la Pologne. En effet, les dirigeants de ces deux
pays n’ont pas accepté le projet de constitution. Pourquoi? Selon
ce texte, après 2009, ils auraient moins de poids dans les décisions
prises au Conseil des ministres. Il arrive souvent que les pays membres défendent
dans l’Union leurs seuls intérêts nationaux. Voici d’autres
exemples. L’Allemagne et la France viennent de prendre quelques libertés
avec les règles budgétaires de l’euro. D’autres pays
s’opposent à des droits sociaux minimum ou à une fiscalité commune.
Toujours est-il qu’en cette année historique, l’Espagne et
la Pologne auraient pu faire un petit effort. En plus, ces deux pays soutiennent
la politique internationale de George Bush. Or, on sait qu’une véritable
Union européenne politique déplairait aux Etats-Unis.

Petits marchandages et Grand Marché

Ces désaccords concernant la constitution font renaître les critiques
habituelles sur l’Union européenne. Pour certains, on a été trop
vite dans l’élargissement. Il fallait d’abord clarifier et
démocratiser le fonctionnement politique de l’Union. La nouvelle
constitution a été surtout préparée par des parlementaires.
Des élus donc. Les gouvernements des pays membres n’ont pas pu se
mettre d’accord sur le texte. Ce sont une fois de plus les ministres qui
décident finalement,. Bref, c’est une sorte de démocratie à l’envers.

Cet échec montre à nouveau que, souvent, les intérêts
des pays l’emportent sur les intérêts communs de l’Union.
Certains pays proposent déjà de continuer avec une Europe à plusieurs
vitesses. Autrement dit, les membres qui veulent avancer avancent. Les autres
pourraient les rejoindre plus tard. C’est encore donner beaucoup de pouvoir
aux gouvernements nationaux sans véritable contrôle parlementaire
européen.

Il reste à peine quatre mois avant l’élargissement. Trouvera-t-on
un accord? En plus, d’autres discussions sont aussi prévues à propos
des budgets de l’Union pour les années 2007 à 2013. Combien
paiera chaque Etat membre? Combien d’aide européenne recevra-t-il?
Les intérêts de tel ou tel pays risquent encore de dominer les débats.
On attend donc toujours une réelle Union européenne politique.
L’Union économique et financière, elle, se porte bien,
merci.

Thierry Verhoeven


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