lundi 3 juin 2024

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On traite ou on sous-traite?


En 2010, les candidats-réfugiés devront être traités de la même manière
pour les 25 pays de l’Union. Photo: Belga

En 2010, les candidats réfugiés seront
traités de la même
manière dans tous les pays de l’Union européenne. Les dirigeants
politiques européens s’y sont engagés. En attendant, les
25 pays membres ont leur propre politique d’asile. Et quand ils proposent
la future politique de l’Union, certains veulent traiter, d’autres
sous-traiter…

Il y a les principes. Il y a les chiffres. Et il y a la
réalité politique.
Pour les principes, en matière d’asile, il y a la Convention de
Genève de 1951. Elle accorde le statut de réfugié à toute
personne menacée dans son pays. Personne menacée à cause
de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son groupe social
ou de ses opinions politiques. Et personne qui ne peut demander la protection
de
son pays. Le texte a plus de 50 ans. Le monde était différent.
Le langage est un peu vieilli. L’idée de «race», par
exemple, n’a, pour la science, plus beaucoup de sens. Mais la Convention
reste un grand principe. Chaque Etat membre de l’Union l’approuve
et déclare d’ailleurs la respecter. Voilà pour le grand
principe. L’Union européenne approuve cette Convention et veut
la respecter dans sa politique d’asile.

Les chiffres

A côté de ces principes, il y a les chiffres. Selon
le HCR des Nations Unies, il y a eu en 2003, 350 000 demandes d’asile
dans les 25 pays de l’actuelle Union européenne. Il y a dix ans,
il y en avait le double. Et pour 2004, le nombre serait encore à la
baisse. Toujours selon le HCR (qui n’est pas une organisation gauchiste),
tout le continent européen
n’accueille que 30% du nombre total de réfugiés dans le
monde.

La réalité politique européenne est, elle, beaucoup
plus compliquée. En attendant 2010, chaque Etat membre de l’Union
fait en grande partie sa propre politique d’asile. Et que voit-on ? De
grandes différences selon les pays. Prenons, par exemple, un candidat
réfugié tchétchène.
Il demande l’asile en Pologne ou en Slovaquie. Il n’a presque aucune
chance d’être reconnu réfugié. Il a la chance de
débarquer
en Autriche: il a 9 chances sur dix. Il y a quelques années, des Irakiens
fuyaient le régime de Saddam Hussein. S’ils demandaient l’asile à la
Grèce, ils n’avaient pas 1 chance sur 100 de l’avoir! Chaque
Etat respecte la Convention de Genève. Mais chaque Etat fait aussi selon
ses moyens financiers. Ou selon le nombre d’électeurs d’extrême
droite dans son pays, etc. Aucun Etat n’a envie d’apparaître
comme trop généreux avec les demandeurs d’asile. Les Etats
membres ont même tendance à vouloir refiler les candidats réfugiés
aux autres pays de l’Union. Ils travaillent quand même ensemble.
Mais surtout pour expulser par charters les candidats refusés.

Une politique
commune en 2010

En 2010, il faudra une seule politique d’asile. Pas facile.
A moins que l’on ne traite les demandes à l’extérieur
de l’Union
européenne. Récemment, les ministres de l’Intérieur
italien et allemand ont fait cette proposition. Pourquoi ne pas sous-traiter
les candidats réfugiés en Afrique du Nord (Libye ou Tunisie)?
Un «portail
de l’immigration», disaient-ils. Des centres de transit… On y
ferait le tri entre bons et mauvais candidats réfugiés. Des camps,
quoi!

Il y a un an, les Britanniques l’avaient déjà envisagé.
L’idée est quand même un peu scandaleuse. D’ailleurs,
d’autres pays européens, comme la France et l’Espagne, s’y
sont opposés. Les centres sont encore exclusivement sur le territoire
de l’Union. On ne va tout de même pas sous-traiter la politique
d’asile
de l’Union européenne.

Mais comment la traiter ? Malheureusement
pour les candidats réfugiés,
il n’y a pas que les grands principes de la Convention de Genève.
Il n’y a pas que les chiffres dérisoires, au fond, des demandes
d’asile. Il y a la clandestinité, ses filières et ses mafias.
Les travailleurs clandestins sont d’ailleurs bien utiles à certains
secteurs d’activité économique. Il y a aussi le débat
sur l’immigration dans la vieille Europe. Dans quelques années,
aura-t-on besoin d’immigrés pour rajeunir notre population? Tout
cela inquiète les bons citoyens européens et leurs dirigeants.
Tout cela fait peur ou au moins fait débat. En attendant, beaucoup de
candidats réfugiés se heurtent à l’Europe forteresse.
En attendant, en dix ans, 4 500 personnes sont mortes en essayant d’immigrer
dans l’Union européenne. Une Union européenne qui n’est
pas seulement un grand espace de libre circulation des marchandises et des
capitaux. Une Union européenne qui est aussi un des plus grands espaces
démocratiques
du monde. La future politique d’asile sera un bon test pour la réalité politique
d’une union…démocratique.

Thierry Verhoeven

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