vendredi 26 avril 2024

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Covid et débat démocratique

Depuis le début de la pandémie de coronavirus, des mesures sont prises pour lutter contre la pandémie. Des mesures qui sont sans doute nécessaires, mais des mesures qui limitent nos libertés et droits fondamentaux. Cela inquiète la Ligue des droits humains et de nombreux défenseurs des droits humains. Le but n’est pas de dire que les mesures sanitaires sont mauvaises. Ce qui dérange, c’est que les mesures ne sont pas discutées au Parlement et que le débat ne soit pas public.

Pas de débat au parlement

Les règles sanitaires de confinement et de déconfinement ont été prises dans l’urgence et par des arrêtés ministériels. Cela veut dire que c’est un ministre seul qui adopte ces mesures. Les mesures sont discutées avant par le gouvernement, mais pas par le parlement. Or, notre démocratie est parlementaire. Les députés du parlement devraient donc pouvoir débattre de ces mesures, mais ils ne sont pas consultés.
En effet, le parlement rassemble des hommes et des femmes politiques élus par les citoyens et les citoyennes. Les parlementaires représentent la population. Les ministres du gouvernement, eux, sont choisis par les partis de la majorité. On n’est pas élu ministre. De plus, au parlement, il y a des débats entre les partis de la majorité qui ont des ministres au gouvernement et les partis d’opposition qui n’ont pas de ministres au gouvernement.

Risques de dérive

Pour la Ligue des droits humains (LDH), l’absence de débat est dangereuse pour la démocratie. Si les pouvoirs sont concentrés entre les mains d’une seule personne ou du seul gouvernement, on risque de prendre des décisions arbitraires. Il n’y a pas de contrôle démocratique.
La LDH remarque aussi que les arrêtés ministériels sont discutés et publiés avec de moins en moins de transparence. Beaucoup d’avocats sont du même avis, car un arrêté ministériel n’a pas de réelle base juridique. On ne peut donc pas, sur base d’un arrêté, faire payer une amende ou condamner à une peine de prison. Trois importantes associations d’avocats ont dit publiquement qu’ils étaient inquiets de cette atteinte à l’État de droit.

Recours en justice

Comme toutes ces protestations n’ont rien changé, les Ligues des droits humains francophone et néerlandophone du pays ont finalement décidé de déposer un recours en justice contre l’Etat belge devant le tribunal de première instance de Bruxelles. Les 2 associations demandent que l’Etat donne un vrai cadre légal aux mesures sanitaires, et fasse un vrai débat parlementaire autour des mesures de lutte contre la pandémie.
Le 31 mars, le tribunal de Bruxelles a donné raison aux 2 associations. Les arrêtés ministériels sont jugés illégaux parce qu’il n’existe pas de loi pour les encadrer. La justice ordonne à l’Etat belge d’adopter une base légale plus solide pour encadrer les mesures sanitaires. L’Etat belge a contesté cette décision et a « fait appel » pour essayer d’obtenir un autre jugement.

Pas contre les mesures Covid !

Cette action en justice ne remet pas en question les mesures sanitaires. La présidente de la LDH, Olivia Venet le rappelle : « Ces mesures sont toujours d’application et il faut les respecter. Ces mesures sont utiles et nécessaires pour protéger le droit à la vie et le droit à la santé de tous les citoyens. » Mais elle ajoute « Quand il y a atteinte à nos libertés fondamentales, il faut qu’il y ait un débat au parlement, un débat public.»

Vers une loi pandémie

Peu après l’action en justice de LDH, le gouvernement a soumis un avant-projet de « loi pandémie » au parlement. Son but: créer un cadre légal pour anticiper et gérer une future crise sanitaire. Cette future « loi pandémie » est déjà très critiquée pour plusieurs raisons. Tout d’abord parce que cet avant-projet vient du gouvernement et non du parlement. Mais surtout parce que ce texte prévoit des interdictions, des amendes et des peines de prison, mais très peu de propositions pour mieux lutter contre d’autres pandémies. Comme, par exemple, renforcer les moyens des hôpitaux.

Séparation des pouvoirs et démocratie

Cette affaire rappelle aussi l’importance de la « séparation des pouvoirs ». Dans un Etat démocratique, il y a 3 grands pouvoirs différents. Le pouvoir législatif qui vote les lois. C’est le parlement. Le pouvoir exécutif qui exécute les lois, qui les réalise. C’est le gouvernement. Le pouvoir judiciaire qui punit ceux qui ne les respectent pas. Ce sont les tribunaux. Séparer les pouvoirs permet que chacun de ces pouvoirs contrôle les autres. Et c’est ce contrôle qui garantit les droits fondamentaux des citoyens.
« On assiste de plus en plus à une concentration des pouvoirs dans l’exécutif, avec un pouvoir législatif affaibli qui ne rédige plus vraiment les lois et un pouvoir judiciaire sous financé », regrette Olivia Venet. Pour elle, cette décision de la justice est une victoire, car elle « montre que le pouvoir judiciaire est indépendant et capable de prendre des décisions à l’encontre de l’exécutif. »

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